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01/09/21 - « Accompagnement d’un projet éolien à Trizac (15) » (entreprise Boralex)

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01/09/21 - « Accompagnement d’un projet éolien à Trizac (15) » (entreprise Boralex)

Par François PALMIER

lundi 30 août 2021

François Palmier est chef de projets énergétiques pour l’entreprise Boralex, sur le territoire du Massif central. Il nous présente l’accompagnement relatif à la mise en place d’un projet éolien et illustre cet accompagnement par un exemple spécifique que son entreprise met en place depuis 2016 à Trizac dans le Cantal.

PF21 : Avant de commencer, pouvez-vous nous dire deux mots sur votre entreprise, Boralex ?
François Palmier : Boralex est une société d’origine québécoise spécialisée dans la conception, la construction et l’exploitation de parcs de production d’électricité décentralisés : éolien, solaire, hydroélectrique et stockage. Elle est installée en France, au Canada, aux Etats-Unis ainsi qu’au Royaume-Uni. Entreprise de territoire, Boralex est présente à travers des antennes locales comme celle où je travaille, située à Chaspuzac en Haute-Loire. Dans les prochaines années Boralex ambitionne de s’étendre en Europe notamment en Grande Bretagne et en Espagne.

PF21 : A 135 km de Chaspuzac, il y a Trizac dans le Cantal. Vous avez proposé un projet éolien à ce territoire ?
F. P. : Oui, dès 2016. Nous avions identifié ce territoire comme zone prometteuse lors de la recherche de sites potentiels que nous avions conduite la même année à l’échelle du département du Cantal. En fait, ce territoire avait déjà été identifié comme intéressant pour l’éolien en 1947 par un député du Cantal né à Trizac – Géraud Henri Jouve – avec l’aide de Pierre Ailleret, l’un des 4 directeurs fondateurs d’EDF après la guerre. Il est vrai que le plateau de Trizac réunit des conditions optimales pour l’éolien, tant par la qualité de la force du vent que par les possibilités de raccordement électrique.
Après différentes études sur la zone, nous avons défini un projet pour l’implantation sur la commune de douze éoliennes. Cela représente un objectif de production de 100 GW/an, ce qui équivaut à la consommation annuelle d’environ 21 000 foyers, ou 40% de la consommation électrique du département du Cantal.

PF21 : Quelles sont les étapes à suivre pour élaborer un schéma d’implantation ? Quelle a été votre démarche ?
F. P. : Nous nous positionnons comme un partenaire du territoire. Aussi, après avoir élaboré une première approche de la préfaisabilité du projet en interne, notre équipe de développement a rencontré le Conseil municipal de Trizac pour lui présenter nos intentions de lancer des études. C’était en 2016, au commencement du projet. Le Conseil municipal de l’époque a trouvé le projet intéressant et nous a autorisé à aller voir les propriétaires fonciers et exploitants agricoles concernés. Nous n’allons jamais démarcher sans accord de la collectivité, c’est dans notre charte éthique. Nous les avons donc rencontrés et comme leurs retours étaient positifs, nous avons lancé les études de faisabilité.

PF21 : Vous dites que vous vous positionnez comme un partenaire des territoires. Qu’entendez-vous par là ?
F.P. : Nous tenons à ce que nos projets s’inscrivent dans une logique de développement territorial, c’est essentiel pour leur ancrage. Chaque territoire est doté d’enjeux globaux et spécifiques. Aussi, notre démarche consiste à aller au-devant de ses acteurs pour instaurer un dialogue avec eux, dans une perspective de développement durable. Notre démarche s’appuie sur l’écoute et la concertation au sein du territoire où nous envisageons de nous implanter. Cela permet d’identifier les enjeux, les interrogations, les attentes et besoins des acteurs, pour les prendre en compte au mieux et dans la mesure du possible, lors de la conception, du développement et de la gestion du projet.

PF21 : Revenons sur les études de faisabilité. Sur quels domaines portent-elles et qui les réalise ?
F.P. : Il y en a plusieurs. Tout d’abord, il y a une étude sur l’impact environnemental du projet. Nous mandatons des bureaux d’études spécialisés indépendants pour qu’ils analysent le territoire sur un cycle biologique complet, c’est-à-dire sur au moins un an. L’expertise porte sur le sol, la faune ou encore la flore du site et de ses environs. Elle permet notamment d’identifier les habitats naturels les plus sensibles, les espèces d’oiseaux et de chauve-souris présentes et leurs activités.
Il y a également une étude du potentiel éolien : pour ce faire, nous installons un mât de mesure de vent sur la zone de projet pour une durée minimale de 3 ans.
Puis, systématiquement, nous réalisons des études pour identifier les avis et perceptions de la population locale, par exemple sur des aspects paysagers ou acoustiques.
Nous établissons ainsi des schémas d’implantation d’éoliennes concertés, tenant compte à la fois des sensibilités environnementales, techniques et paysagères identifiées lors des études préalables, et des échanges avec les acteurs du territoire et les administrations.

PF21 : Comment s’organise la gouvernance de ces projets ?
F.P. : A Trizac, en 2016, j’avais mis en place des permanences d’information pour recueillir les perceptions des acteurs du territoire. Mais avec l’expérience, je me suis rendu compte qu’il valait mieux monter un comité de pilotage, ce que je fais depuis deux ans pour chaque nouveau projet. Cela permet de faire participer activement des acteurs du territoire au processus d’élaboration du projet, et de coordonner le projet avec les attentes et besoins locaux. Au Québec, nous allons plus loin : nous faisons entrer des collectivités ou communautés dans la gouvernance et dans le capital du projet. Ainsi, nous sommes tous co-actionnaires du projet, nous partageons à la fois les dépenses et les recettes. En France ce modèle commence à voir le jour. Sur le département de la Haute-Loire, nous avons ouvert à plus de 40% notre capital sur une centrale solaire nommée « La clé des champs » avec les habitants de la Haute-Loire et les collectivités.

PF21 : Qui anime le comité de pilotage ?
F.P. : Nous faisons appel soit à des CPIE (Centres Permanents d’Initiatives pour l’Environnement), soit à des bureaux d’études indépendants, soit nous animons nous-mêmes. Tout est tracé : les échanges sont retranscrits dans un compte rendu qui est diffusé à l’ensemble des membres du comité (société civile, collectivités, associations).

PF21 : Et qui décide ?
F.P. : La décision finale appartient à Boralex puisque c’est notre entreprise qui conduit le projet. Mais pour que le projet se déroule au mieux dans le temps, de sa conception jusqu’à sa fin, il est plus que souhaitable que nos décisions tiennent compte des requêtes et suggestions des acteurs du territoire, traitées au sein du comité de pilotage ou d’une autre forme. Il y a forcément toujours des divergences d’opinions, c’est normal, mais si aucun consensus n’est trouvé au sein du comité de pilotage, nous préférons revoir le projet.

PF21 : Pour revenir sur le projet éolien à Trizac, où en êtes-vous aujourd’hui ?
F.P. : Le projet a passé toutes les étapes de validation préalables au dépôt de demande auprès des services de l’Etat. Il a été instruit par l’Etat qui l’a jugé recevable. Il est actuellement en cours d’enquête publique, aussi, j’invite toutes les personnes intéressées à déposer leur avis jusqu’au 20 septembre 2021 inclus sur le registre de recueil à la mairie de Trizac, en ligne ICI, ou par mail à pref-environnement@cantal.gouv.fr (Plus d’informations ICI).

PF21 : Et pour l’offre d’accompagnement ? Vous en êtes où ?
F.P. : Parce que le projet est exceptionnel, par la puissance et la force du vent, nous avons proposé un accompagnement financier à titre exceptionnel : ainsi, le projet proposé à Trizac va plus loin qu’un projet classique de production d’énergie. Boralex propose de participer à la facture énergétique de tous les foyers de la commune et des communes limitrophes. Cela signifie que pendant les 30 ans de l’exploitation du site, 1 420 foyers pourront chacun bénéficier d’une réduction de plus de 200 € sur leur facture d’électricité annuelle, sans condition de revenus. Le montant de cette aide sera réactualisé chaque année. Le foyer fiscal devra simplement changer de fournisseur d’électricité pour passer à un fournisseur d’électricité verte partenaire de Boralex sur le projet. Pour l’instant, nos partenaires références sont Plüm énergie, Volterres et Energie d’Ici. Notre objectif aujourd’hui est de recueillir un maximum de réponses positives de la part des foyers.

PF21 : Quelles sont les retombées pour une commune comme Trizac et pour les propriétaires des terrains où sont implantées les éoliennes ? F.P. : Si le projet de parc éolien voit le jour, les collectivités du territoire de Trizac bénéficieront de retombées fiscales évaluées à 425 000 € par an. Les propriétaires et les exploitants agricoles bailleurs bénéficieront quant à eux d’un loyer annuel durant toute la durée d’exploitation.
Le projet présente aussi un intérêt pour les entreprises locales. Pour le chantier, nous ferons appel aux entreprises locale du BTP. Nous évaluons cette sous-traitance à plus de 5 millions d’€.
Il faudra aussi que les équipes du chantier se logent et se nourrissent, ce qui fera marcher le secteur de l’hôtellerie-restauration et de la location de logements au niveau local, pendant toute la durée du chantier qui devrait durée une année.
Enfin, certains territoires profitent de la présence d’un parc éolien sur leur périmètre pour créer une dynamique, notamment dans le domaine du tourisme ou de l’agrotourisme. Je pense notamment à l’association Ally 2000, en Haute-Loire, qui a monté un projet de développement local intégrant offre culturelle, activés récréatives, gastronomie et tourisme industriel avec les éoliennes.

PF21 : Quels autres intérêts le projet peut-il avoir pour le développement durable du territoire ?
F. P. : D’un point de vue environnemental, le projet permet de fournir de l’électricité renouvelable pour le réseau. Il contribue à la transition énergétique et à la lutte contre le changement climatique en fournissant de l’énergie par des procédés qui n’émettent pas ou très peu de gaz à effets de serre. EDF a évalué ces rejets à 11g de CO2 par KWh électrique produit, contre 840 g pour le fuel et 1 040 g pour le charbon.
Toujours d’un point de vue environnemental, nous veillons à rendre un site propre en fin d’exploitation. C’est pourquoi le démantèlement complet du parc éolien en fin de vie est prévu dès la conception du projet, selon les principes de l’économie circulaire.

PF21 : Que devient le matériel après le démantèlement du parc ?
F.P. : Il est soit recyclé, soit réemployé. Aujourd’hui, une éolienne se recycle à 90 %. Les pales sont démontées puis incinérées ou broyées et utilisées dans la fabrication de béton fibré. Les autres composants sont des métaux qui n’ont aucun mal à trouver preneurs pour être recyclés. En fait, ce sont surtout les pales qui portent l’attention du recyclage, et c’est pourquoi VESTAS, l’un des plus grands turbiniers au monde, propose dorénavant des pales 100 % recyclables.

PF21 : D’autres intérêts, du point de vue environnemental ?
F.P. : Oui, nous proposons de prendre en charge le coût d’un changement de pratique pastorale en faveur de la biodiversité et de la qualité de l’eau. Ce protocole, piloté par la LPO et des vétérinaires locaux, consiste pour les agriculteurs à utiliser des alternatives au vermifuge. 500 ha d’estives sont concernés. La contribution financière que nous proposons est de 18 000 €/an pendant 5 ans. Elle va servir à former des vétérinaires, à réaliser des analyses et à acheter des traitements alternatifs pour les agriculteurs.

PF21 : Boralex est adhérent de la Plate-forme 21 depuis quelques mois. En quoi notre association intéresse-t-elle votre entreprise ?
F. P. : Elle nous intéresse pour confronter nos idées et innovations au territoire et pouvoir les ajuster pour les améliorer. A la Plate-forme 21, il y a une grande diversité d’acteurs et donc d’opinions, ce qui est un véritable atout pour faire émerger de nouvelles idées, nous aider à sortir de notre domaine, à voir ce qui est proposé ailleurs. Nous souhaiterions dupliquer l’accompagnement proposé à Trizac sur d’autres projets énergétiques, voire innover en la matière grâce aux échanges avec les autres adhérents. Les adhérents de la Plate-forme 21 peuvent nous aider dans ce sens.

Contact : François Palmier, Chef de projets
francois.palmier@boralex.com
Tél. 06 03 33 06 05

Pour en savoir plus également :
• Site de Boralex : https://www.boralex.com/fr/projects/trizac
• Journal de l’éolien n°4 (Boralex, juillet 2021) : le projet de Trizac.
• Plaquette de présentation synthétique du projet éolien de Trizac. (Boralex, février 2021)

PDF - 1.4 Mo
Le Journal de l’Eolien (N°4, Juillet 2021)
Journal interne BORALEX : présentation du projet éolien de Trizac.
PDF - 3.6 Mo
Le projet de Trizac (Synthèse, février 2021)
Plaquette de présentation synthétique du projet de Trizac par Boralex. Février 2021